On entend souvent des phrases du type « ce n’est pas parce qu’il/elle est en souffrance qu’il/elle ne doit pas s’intéresser aux autres, ou qu’il/elle doivent s’en prendre aux autres etc ». En réalité, la souffrance est LA seule raison qui explique que les gens soient centrés sur eux-mêmes , rien d’autre.
«Il est souvent tragique de voir à quel point d’évidence un homme gâche sa propre vie et celle des autres sans pouvoir, pour rien au monde, discerner dans quelle mesure toute la tragédie vient de lui-même et se trouve sans cesse alimentée et entretenue par lui même.»
J’ai envie de parler ici de quelque chose qui m’a toujours été difficile, si mes réponses peuvent aider quiconque qui passerait sur ce blog…
Un égo sain, c’est quoi ?
Un égo sain est un égo structuré, un égo capable de se positionner, de s’affirmer, d’agir sans avoir à tergiverser, on peut dire que c’est un égo aligné avec le Soi en quelque sorte, un égo qui va dans le sens du Soi, de ses propres valeurs et celles universelles, un égo qui se respecte tout en respectant les autres.
L’égo est indispensable pour se construire, de toute façon la question ne se pose pas puisque tout est égo, en tout cas tant que nous ne sommes pas éveillés.
Cependant, certains égos sont mal construits, mal structurés, ça a été le cas pour moi.
Un égo mal structuré est un égo sans « limites », c’est à dire un égo incapable de mettre une séparation entre soi et l’autre – en tout cas dans les apparences, parce qu’en réalité, il est toujours en dualité -.
L’origine trouve ses racines dans l’enfance probablement (ou dans le karma pour d’autres, c’est la même chose), et concerne surtout les personnes qui n’ont pas reçu ce dont elles avaient besoin (affection, reconnaissance, approbation, limites même…).
L’égo n’ayant pas été nourri de la façon dont il aurait eu besoin pour se construire d’une manière « saine », cela entraîne pour la plupart de ces personnes un fonctionnement anormal du mental, par effet de compensation. Ces personnes (dont je fais partie) ont développé une résistance mentale à beaucoup de choses ; elles apparaissent pour des personnes à forte personnalité, résistantes à tout et d’ailleurs, la vie va leur présenter du fil à retordre, des situations de plus en plus complexes ce qui va encore et encore alimenter leur mental.
La subtilité de l’égo dans tout ça ?
Il y a les personnes à fort égo (les « moi je » par exemple) et les personnes à fort égo également mais qui nient l’égo ! Bien sur, ils n’en sont pas vraiment responsables, en fait, il ne nient pas vraiment, simplement leur égo est diffus, donc insaisissable sous la forme d’un Moi. Pour autant, cela ne signifie pas que l’égo soit absent, aussi sages et compatissants qu’ils puissent paraître ! Non, l’égo est bien là, il a même trouvé une place royale puisqu’il arrive à faire croire qu’il n’existe pas !
En réalité, il est tout simplement mal structuré ; lorsqu’on le cherche, on ne le trouve nul part (ce qui est normal puisque d’un point de vue absolu, l’égo n’existe pas). D’un point de vue relatif en revanche, l’égo est indispensable, ne serait-ce que pour se construire.
Lorsque je me suis engagée dans le bouddhisme il y a plusieurs années, pour moi constater que le Moi n’existait pas n’était pas un problème, je ne le ressentais pas en moi, et pourtant j’allais être confrontée à un autre type de problème, me trouver un Moi !
Un égo mal structuré est un égo incapable de se positionner, perméable à tout ce qui l’entoure, et dont l’ultime objectif est de…nous maintenir dans la souffrance !
Les personnes qui ont un tel égo, sont des personnes qui développent souvent de grandes capacités mentales, parfois un excès de compassion, d’empathie, de la sagesse aussi tout en entretenant au fond d’elles-mêmes une énorme souffrance par leur incapacité à être en relation avec ce « Je ».
Ce sont souvent des personnes sujettes à manipulation, perversion, narcissisme et égocentrisme en tous genres, elles attirent à elles d’autres égos aussi mal structurés qui s’emboitent parfaitement avec leur propre « névrose ». Et souvent, plutôt qu’y mettre un terme et se positionner, elles développent un processus mental encore plus puissant de compassion, empathie, compréhension etc…Est-ce à dire que c’est de la fausse compassion, de la fausse empathie, de la fausse bonté ? non, car tout processus passe en général par le mental avant d’intégrer le coeur. Cependant, c’est un très mauvais équilibre entre le mental et le Soi.
Et c’est le serpent qui se mort la queue, plus on souffre, plus on développe du mental pour compenser, alors comment s’en sortir ?
Il y a plusieurs formes de thérapie pour cela, pour en avoir testées plusieurs, aucune n’a fonctionné pour moi. La seule chose qui m’a été réellement utile a été de prendre conscience de mon enfant intérieur ; ça a été un bon point de départ mais ça n’a pas été suffisant pour les raisons évoquées avant, mon mental était trop puissant.
Se dire « je suis quelqu’un de bien, je mérite mieux, j’ai des qualités etc… », tout cela ne tient qu’un temps. C’est en quelque sorte créer un égo artificiel pour combler les déficits de celui d’origine, pour moi ça n’a pas donné de résultats. Et j’ai été confrontée (il le fallait) à la constatation que je n’arriverai jamais à me construire un bon égo, j’avais même accepté l’idée d’être manipulée, blessée, j’avais même l’impression que cela m’aiderait dans ma quête de sagesse en développant de plus en plus de compassion. Ca a été le cas en fait, mais dans le même temps, je développais de plus en plus d’anéantissement et encaissais de plus en plus de souffrance, ce qui était un régal pour mon égo mais…
Chaque situation a ses propres limites et c’était sans compter sur l’épuisement du mental !
L’épuisement du mental a été Ma réponse. De situations de plus en plus inextricables, le mental, par refus conscient de continuer à subir, a fini par s’épuiser.
Lorsque plus rien ne fonctionne à partir du mental, alors il s’arrête, ou s’amenuise en tout cas.
Certains appelleraient cela une profonde déprime, en tout cas, c’est une constatation d’incapacité à donner des réponses à des situations, comme si tout nous échappait et que le mental ne pouvait plus être d’une aide quelconque, ne disposant d’aucunes données extérieures pour le contenter !
Et que se passe-t-il lorsqu’on ne peut plus se raccrocher à l’extérieur ? Et bien, il reste le soi, ou ce qu’on observe comme étant le Soi. Le « pouvoir » est rendu à l’enfant qui sommeille en soi, parce que c’est de là que part la véritable force, pas du mental, mais du Soi.
En lâchant le mental, la force est automatiquement basculée vers le Soi, parce qu’il n’y a pas d’autre choix.
Il y a quelques mois, je croyais être définitivement sortie du genre de situations que je vivais en récurrence, je me disais « enfin je vais pouvoir me sentir heureuse » ! Mais la vie n’en a pas décidé ainsi, elle me préparait un cocktail encore plus explosif que les autres, un peu pour me dire « tu n’as pas encore compris la leçon, alors prépare-toi au bouquet final » 😉 Elle ne m’a pas loupée, j’ai cru en mourir, et la leçon était simple, presque évidente « LACHE CE MENTAL et TU VERRAS ENFIN » ce qui a toujours été là !
Pour lâcher le mental, c’est simple mais long, la méditation ! J’ai également étudié le Tao et les grandes lois fondamentales universelles qui m’ont donnée un aperçu plus large du fonctionnement de l’Univers et ses lois de causalité. Lorsque je me surprends à cogiter, supposer, imaginer, croire etc…je n’écoute plus mes pensées (j’essaie en tout cas), comme un raz le bol, une saturation, un refus épidermique à me laisser entrainer ailleurs que dans l’instant !
Parce que je ne sais rien, et ça je le sais 😉 Mais c’est encore du mental !
N’importe quel malaise devient une base de pratique.
On inspire, en sachant que sa souffrance est partagée,
qu’il y a partout sur terre des gens qui ressentent
exactement la même chose au même moment.
Ce simple geste est comme une graine
de compassion pour soi et autrui.
C’est ainsi que nos rages de dents,
nos insomnies, nos divorces
et notre terreur deviennent
notre lien avec
toute
l’humanité.